SUEURS FROIDES/ VERTIGO est un film réalisé par Alfred Hitchcock.
Le scénario est écrit par Alec Copper et Samuel Taylor, d'après le roman D'Entre les morts de Pierre Boileau et Thomas Narcejac. La photographie est signée Robert Burks. La musique est composée par Bernard Hermann.
Dans les rôles principaux, on trouve : James Stewart (John "Scottie" Ferguson), Kim Novak (Madeleine Elster/Judy Barton), Tom Helmore (Gavin Elster), Barbara Bel Geddes (Midge Wood).
Le plus générique de l'histoire du cinéma !
Signé Saul Bass.
John "Scottie" Ferguson a quitté la police après la mort d'un de ses collègues qu'il n'a pu sauver, à cause du vertige dont il souffre, alors qu'ils poursuivaient un malfrat sur les toits de San Francisco.
Midge Wood et John "Scottie" Ferguson
(Barbara Bel Geddes et James Stewart)
Depuis il vit aux côtés de sa compagne, Midge Wood, qui tente de le réconforter. C'est alors qu'il est contacté par un ancien camarade de classe, Gavin Elster. Il lui demande de suivre et de surveiller son épouse, Madeleine, obsédée par le souvenir d'une de ses ancêtres, Carlotta Valdes, morte un siècle plus tôt.
John "Scottie" Ferguson et Gavin Elster
(James Stewart et Tom Helmore)
La filature de "Scottie" lui permet de sauver Madeleine de la noyade dans la baie de San Francisco où elle s'est jetée pour se suicider. Il s'éprend d'elle aussitôt et se met, pour passer du temps avec elle, à négliger Midge et à mentir à Gavin.
Madeleine Elster et John "Scottie" Ferguson
(Kim Novak et James Stewart)
Ensemble, "Scottie" et Madeleine visitent la mission de San Juan Bautista au sommet du clocher duquel la jeune femme grimpe et se se jette. A nouveau victime d'une crise d'acrophobie, il ne peut l'en empêcher. L'enquête de police conclut à un suicide tandis que "Scottie" sombre à nouveau dans la dépression.
John "Scottie" Ferguson et Judy Barton
(James Stewart et Kim Novak)
Mais le détective est bouleversé lorsqu'il remarque un jour une jeune femme, Judy Barton, ressemblant de façon troublante à la défunte Madeleine. Il l'aborde et la convainc difficilement mais progressivement de se coiffer et s'habiller comme la disparue. Cette transformation convainc "Scottie" qu'il a peut-être été le pion d'une savante machination ourdie par Gavin Elster : son intuition est confirmée lorsqu'il découvre sur Judy le même bijou que portait naguère Carlotta Valdes.
Il entraîne alors la jeune femme à la mission de San Juan Bautista pour la faire avouer et dénoncer Elster. Mais l'apparition soudaine d'une religieuse dans le clocher provoque la chute mortelle de Judy. "Scottie" a percé le mystère mais reste pétrifié au bord du vide.
Difficile à croire aujourd'hui mais, à l'époque de sa sortie, Vertigo fut vivement moqué par la critique et boudé par le public, ce qui mortifia Alfred Hitchcock, qui s'était profondément investi dans ce projet - sans nul doute son oeuvre la plus personnelle. Il faudra attendre une dizaine d'années pour que le film soit réévalué : une seconde vie à l'image du thème du double, de la résurrection, qui donne sa structure à cette curieuse intrigue policière imaginée par le célèbre binôme français, Boileau-Narcejac.
Initialement, Hitchcock souhaitait adapter un autre de leurs romans, Les Diaboliques, mais les droits en avaient été acquis par Henri-Georges Clouzot (qui en tirera un fameux thriller, avec Simone Signoret et Paul Meurisse, 1954). Il découvre alors D'Entre les morts et demande à Alec Copper d'en écrire une version, mais le résultat ne le satisfera pas et Samuel Taylor remaniera le document et produira le script entier inspiré par des scènes visuellement désirées par Hitchcock.
Le sujet hante le cinéaste qui, victime de problèmes de santé, croit sa fin proche (même s'il ne mourra que 22 ans plus tard). Il est également contrarié car il n'obtient pas l'actrice qu'il souhaite : Vera Miles doit se désister en apprenant qu'elle est enceinte, et il parie sur une débutante dont la personnalité franche mais naïve le séduit, Kim Novak, dont le double rôle de Madeleine/Judy sera le plus beau de sa carrière.
Pour incarner "Scottie" Ferguson, Hitchcock veut d'abord retrouver Cary Grant mais il refuse et le réalisateur hésite à rappeler James Stewart qu'il juge trop vieux et pas assez séduisant pour ce personnage. Mais il admet rapidement son erreur et obtiendra de son interprète une composition inoubliable : Stewart traduit à la perfection les fantasmes tordus de son metteur en scène avec ce détective dont on peut estimer qu'il découvre rapidement la vérité sur l'affaire qu'il accepte mais qui en joue le jeu par masochisme, voire pour s'auto-détruire, comme pour se punir de ses précédents échecs (la mort de son collègue policier puis de Madeleine).
Ce héros trouble exprime surtout ce que Hitchcock nomme le "sexe psychologique" car il veut transformer Judy en Madeleine pour assouvir un désir clairement nécrophile : plus il la rhabille, la recoiffe, la re-maquille, plus il la dénude en vérité afin de percer le mystère et posséder la morte qu'il a tant désirée et aimée. Ce procédé culmine dans la scène où "Scottie" demande à Judy d'attacher ses cheveux en un chignon en forme de spirale - la forme qui évoque le vertige, la chute - et qui signifie la manière de déposséder Judy pour étreindre à nouveau Madeleine.
Ces pulsions duelles (vertige, désir, vie, mort, deuil, renaissance, tromperie, vérité, amour, sexe) se verront prolongées dans l'exploitation en salles du film : Hitchcock obtiendra qu'il ne soit plus projeté pendant vingt ans, le temps d'alimenter le mythe, la légende d'une oeuvre incomprise, et de redonner envie de la découvrir. Après des années d'invisibilité, la critique et le public reconsidéreront totalement ces Sueurs froides, faisant du ratage d'hier un chef d'oeuvre réhabilité, au point que son titre français ridicule sera effacé des tablettes.
Comme "Scottie" a recréé Madeleine, Hitchcock a permis à Vertigo d'avoir une seconde chance, une nouvelle vie.
Mais surtout, ce film synthétisera le plus complètement les obsessions d'Hitchcock, empruntant autant à l'atmosphère hantée de Rebecca qu'à l'enquête psychanalytique de La Maison du Dr. Edwardes tout en préfigurant la romance perverse de Pas de printemps pour Marnie : c'est un long métrage total, après lequel, n'en déplaisent aux idolâtres du "maître du suspense", comme le soutient Brian de Palma, plus rien ne sera comme avant ni aussi bon et fort dans son oeuvre.
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