SULLY est un film réalisé par Clint Eastwood.
Le scénario est écrit par Todd Komarnicki, d'après Highest Duty : My Search for what really matters de Chesley Sullenberger et Jeffrey Zaslow. La photographie est signée Tom Stern. La musique est composée par Christian Jacob & The Tierney Sutton Band.
Dans les rôles principaux, on trouve : Tom Hanks (capitaine Chesley "Sully" Sullenberger), Aaron Eckhart (Jeff Skiles), Laura Linney (Lauren Sullenberger), Mike O'Malley (Charles Porter), Jamey Sheridan (Ben Edwards), Anna Gunn (Elizabeth Edwards).
Jeff Skiles et Chesley "Sully" Sullenberger
(Aaron Eckhart et Tom Hanks)
Le 15 Janvier 2009, le capitaine Chesley "Sully" Sullenberger et son co-pilote Jeff Skiles décollent de l'aéroport LaGuardia aux commandes de l'Airbus A320 de l'US Airways. Le vol 1549 transporte 155 passagers à son bord. Mais après trois minutes de vol à une altitude estimée de 2 800 pieds (environ 850 mètres), l'avion est percuté par un troupeau d'oiseaux qui endommage ses réacteurs. Privés de leurs moteurs et jugeant impossible d'atteindre les aéroports les plus proches, comme celui de Teterboro, Sully et Skiles décident de poser leur appareil sur l'Hudson River.
Amerrissage sur l'Hudson River
L'équipage et les passagers en sortent tous indemnes. Mais malgré cet exploit, Sully est victime de stress post-traumatique tandis que les médias l'honorent comme un héros. Par ailleurs les données préliminaires du bureau fédéral de l'aviation suggèrent que seulement un moteur était sérieusement atteint, ce qui signifie que le capitaine a accompli une manoeuvre inconsidérément dangereuse et qu'il aurait pu retourner atterrir à LaGuardia.
L'évacuation des 155 passagers du vol 1549
Plusieurs simulations de vol confirment ces conclusions et accablent Sully. Mais le capitaine ne se démonte pas face à ces accusations : il persiste à affirmer qu'il avait perdu ses deux réacteurs, ce qui le privait de temps, de vitesse et d'altitude pour regagner LaGuardia.
Sully
Si la commission d'enquête conclut qu'il s'agit d'une erreur humaine, la carrière de Sully est terminée, malgré ses états de service irréprochables et son expérience. Il obtient que de nouvelles simulations soient réalisées en direct et bien qu'elles le contredisent, il relève qu'elles ne sont pas crédibles car les pilotes ont été informés de la situation et de l'action d'urgence à effectuer, contrairement à Skiles et lui.
Le conseil acceptent les arguments de Sully, confirmés in fine par l'analyse du moteur récupéré et effectivement désactivé par les impacts des oiseaux. Le capitaine et son co-pilote sont réhabilités car ils ont sélectionné la meilleure option pour sauver les passagers et l'équipage.
Sully et Skiles
Transformer un événement de quatre minutes en un film d'une heure et demi, tel est le pari que s'est lancé Clint Eastwood. Le résultat est si brillamment accompli qu'on ne ressent jamais un quelconque remplissage - au contraire : le cinéaste reste fidèle à son style sec et direct, au plus près des faits et des protagonistes, avec une rigueur exemplaire.
Sully est un long métrage captivant, qui peut se lire comme le double inversé de son précédent opus, American Sniper : ici, le héros ne tue pas mais il sauve 155 passagers d'un avion qu'il a choisi, avec une incroyable audace, mais aussi un formidable flair, de poser sur l'Hudson River après un incident de vol.
Pourtant Chesley Sullenberger n'est pas d'un seul bloc : son geste le hante au point de le rendre insomniaque et sujet à des visions cauchemardesques - il revoit sa manoeuvre et échoue cette fois-ci, en se crashant contre les tours de Manhattan (renvoyant évidemment aux attentats du 11 Septembre 2001). Il ne cesse de questionner son co-pilote, le pourtant solidaire et admiratif Jeff Skiles, sur la pertinence de son choix : dans les chambres d'hôtel où ils attendent d'être auditionnés par une commission d'enquête, où les assureurs veulent les accabler, les deux hommes tournent en rond, comme des ours en cage, dépassés par ce qu'ils ont accompli mais aussi par ce qui les attend. Sully a d'ailleurs bien du mal à rassurer sa femme, devant la maison de laquelle les journalistes font le pied de grue, et qui sait que s'il est reconnu coupable d'imprudence, sa carrière est terminée - et leur situation sociale compromise.
Eastwood traite ces appréhensions avec intensité avant d'entrer dans le troisième acte de son récit (suivant donc le sauvetage et l'attente des auditions). Le contraste est alors saisissant entre l'extérieur, où médias et anonymes considèrent Sully comme un authentique héros, et l'intérieur, où le capitaine et son co-pilote sont traités comme des têtes brûlées irresponsables. L'ambiguïté s'installe : et si les sauveurs du vol 1549 étaient des imposteurs (un commandant de bord trop vieux, son second incompétent), ayant miraculeusement réussi une manoeuvre périlleuse ?
La mise en scène et le scénario réussissent à faire passer cette partie procédurière avec une fluidité magistrale, évitant que le spectateur ne soit noyé par des termes trop techniques ou des arguties juridiques. Au lieu de ça, Eastwood montre à plusieurs reprises l'amerrissage, à travers les yeux de Sully et Skiles, d'une famille de passagers, du contrôleur du ciel, des pilotes des simulations, et progressivement la vérité éclate. Le procédé est spectaculaire et intimiste à la fois, tendu, vibrant : une leçon de narration.
Tom Hanks, digne héritier moderne de "l'honnête homme" américain, dans la lignée d'un Spencer Tracy (auquel il fait ici penser avec ses cheveux blanchis, sa démarche lente, ses gestes mesurés), est l'interprète idéal pour incarner ce héros malgré lui, à la fois droit et modeste, ébranlé mais déterminé. Aux côtés de l'excellent Aaron Eckhart et d'une multitude de seconds rôles et figurants impeccables, l'aventure devient collective, impliquant l'esprit de corps formé par les sauveteurs, les policiers, les contrôleurs aériens, les passagers, les familles. Comme le dit Sully, cela n'a été possible que parce qu'ils l'ont fait ensemble - et comme l'ajoute, avec humour, Skiles, si c'était à refaire, il préférerait juste que ça soit en Juillet.
Exaltant le courage, l'entraide, le surpassement, mais avec humilité, Sully ressemble en fait terriblement à un plaidoyer pour une Amérique solidaire et refusant de se résigner, ce qui rend le film encore plus troublant de la part d'un supporter affiché de Trump, le grand diviseur de sa nation.
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