FIDELIO, L'ODYSSEE D'ALICE est un film réalisé par Lucie Borleteau.
Le scénario est écrit par Lucie Borleteau, Clara Bourreau et Mathilde Boisseleau. La photographie est signée Simon Beaufils. La musique est composée par Thomas de Pourquery.
Dans les rôles principaux, on trouve : Ariane Labed (Alice Lesage), Melvil Poupaud (commandant Gaël Levasseur), Anders Danielsen Lie (Felix Bjornssen), Nathaniel Maïni (Frédéric), Vimala Pons (Sarah Lesage), Jan Privat (Patrick Legall).
Alice(Ariane Labed)
Alice est en vacances avec son fiancé, Felix, lorsqu'elle apprend qu'elle est engagée pour une mission de trente jours sur le "Fidelio", un cargo de la marine marchande, où elle doit remplacer un mécanicien, mort d'un AVC.
Félix et Alice(Anders Danielsen Lie et Ariane Labed)
Une fois à bord, elle découvre que le commandant n'est autre que Gaël Levasseur, son amour de jeunesse, toujours épris d'elle, même s'il s'est marié et qu'il est père de deux enfants. Conformément à son souhait, la dépouille de Patrick Legall est rendue à la mer après que Gaël ait obtenu la permission des autorités maritimes.
(Melvil Poupaud)
A bord, Alice gagne rapidement le respect de l'équipage grâce à son efficacité dans la maintenance et les réparations du bateau. Occupant la cabine de son prédécesseur, elle découvre dans ses affaires le journal intime qu'il écrivait et se met à le lire. Une nuit, le chef mécano s'introduit dans sa chambre et tente d'abuser d'Alice mais elle le repousse. Le lendemain, il lui explique que si elle parle, personne ne la croira, mais elle menace alors de le dénoncer au commandant et obtient qu'il quitte le "Fidelio" à la prochaine escale.
A bord du "Fidelio"
Le navire accoste dans un port d'Afrique de l'Ouest. Alice en profite pour joindre dans un cyber-café Felix puis, le soir venu, rejoint l'équipage dans une boîte de nuit où elle fête son trentième anniversaire. Le lendemain, un nouveau chef mécanicien est recruté et le "Fidelio" repart.
Alice et Gaël
Alice prend un verre avec Gaël dans sa cabine et couche à nouveau avec lui tandis que le bateau passe l'Equateur. Direction : Marseille où la jeune femme retrouve sa famille et Felix. Elle avoue à sa soeur Sarah son infidélité sans savoir ce qu'elle compte faire maintenant. Un appel téléphonique la prévient qu'elle est promue mécanicienne en chef et doit repartir pour trois mois en mer à bord du "Fidelio". Juste avant son départ, Felix apprend son histoire avec Gaël et ils conviennent d'en parler à son retour.
Alice
A bord, Alice se replonge dans la lecture du journal de Legall et apprend qu'il avait refusé de subir une opération de chirurgie cardiaque, ce qui n'avait pas empêché Gaël de le laisser embarquer. Ce dernier veut reprendre sa liaison avec la jeune femme mais elle l'évite. La nuit de Noël, elle couche avec un jeune mécanicien, Frédéric, acceptant comme elle que cela n'ait pas de suite.
Alice et Gaël
Le "Fidelio" se dirige vers la Norvège tandis que Gaël reconquiert Alice. Un incendie dans la salle des machines est rapidement maîtrisé mais Gaël est superficiellement brûlé. L'armateur est prévenu de la situation. Le bateau arrive à bon port et Alice retrouve Felix pendant qu'une ambulance conduit Gaël à l'hôpital. Décision a été prise que le cargo allait être démantelé. L'équipage se disperse, ses membres vont chercher une nouvelle place sur un autre navire.
Dans le jeune cinéma français, souvent raillé pour son goût des histoires intimistes, Lucie Borleteau, ancienne productrice de documentaires, a créé la sensation lors du Festival de Locarno en 2014 avec ce film conjuguant le grand récit sentimental et l'odyssée maritime. Le résultat est plus que concluant, s'aventurant dans des territoires rarement explorés.
En couple avec un romantique artiste norvégien (dont les dessins sont réalisés par le "bédéaste" Christophe Blain, auteur des séries Isaac le pirate, Gus ou Quai d'Orsay), Alice semble promise à ne vie rangée et paisible jusqu'à son destin bascule en étant appelée sur un rafiot usé dont le commandant est son amour de jeunesse. Filmé dans un superbe format Scope, qui donne une dimension mythique à ce cadre, le récit montre d'abord une communauté de marins où elle est la seule femme et qui assiste à ce retour de flamme aussi discrète qu'évidente, ponctué ironiquement par les avaries régulières du navire.
Cette romance met en lumière le dilemme de l'héroïne, tiraillée entre le confort sur terre, personnifié par Felix, et la passion en mer, incarnée par Gaël : elle se met alors à douter, à se chercher, tout en étant une femme désirant autant qu'objet de désir, à la fois spontanée dans ses élans et attachée à son indépendance. Alice est honnête avec elle-même, lucide, traversant cette tempête tantôt avec calme, tantôt avec fébrilité. Le voyage devient alors aussi bien intérieur qu'épique.
Ariane Labed, qui a décroché le Prix d'interprétation à Locarno pour ce rôle, donne tout à son personnage, elle s'y révèle sensible, sensuel, trouble, troublante, imposant un jeu fascinant et physique (héritée de sa formation de danseuse), exprimant avec intensité les frémissements amoureux. Face à elle, Melvil Poupaud est également remarquable, magnétique, charmeur et ému à la fois : derrière le masque de l'officier sûr de lui se découvre progressivement un homme qui n'a jamais aimé autant.
Mais la beauté majestueuse du film tient aussi (surtout ?) dans son ambiance charnelle et onirique, supplantant rapidement le naturalisme sec du début (avec la représentation de la vie à bord, les ennuis techniques du bateau, les rapports d'autorité, etc). Le navire devient alors un espace abritant fantasmes, aspirations et renoncements, un vaisseau fantôme peuplé d'âmes errantes, de corps solitaires, de sirènes tentatrices, hanté par le souvenir de ce mécano mort dans des circonstances floues. C'est en découvrant son journal qu'Alice reconsidère sa vie, son métier, les sacrifices qu'il lui impose, la force de son amour.
A la fois magnifique portrait de femme, exempt de tous clichés, voyage initiatique, aventure en terres lointaines (aussi bien géographiquement que sentimentalement), Fidelio, L'Odyssée d'Alice accomplit un tour de force en liant le romanesque et l'intime, imposant une cinéaste au style puissant et sa prodigieuse actrice.
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