LES TRIBULATIONS D'UN CHINOIS EN CHINE est un film réalisé par Philippe de Broca.
Le scénario est écrit par Daniel Boulanger, d'après le roman de Jules Verne. La photographie est signée Edmond Séchan. La musique est composée par Georges Delerue.
Dans les rôles principaux, on trouve : Jean-Paul Belmondo (Arthur Lempereur), Jean Rochefort (Léon), Ursula Andress (Alexandrine Pinardel), Maria Pacôme (Suzy Ponchabert), Valérie Lagrange (Alice Ponchabert), Jess Hahn (Cornélius Ponchabert), Paul Preboist (Cornac), Mario David (Roquentin), Darry Cowl (Biscoton), Valéry Inkijinoff (Mr. Goh).
Arthur Lempereur
(Jean-Paul Belmondo)
Jeune milliardaire blasé et oisif, Arthur Lempereur multiplie les tentatives de suicide pour tromper son ennui. Sa belle famille, les Ponchabert, compte sur une croisière en Orient pour lui rendre le goût de vivre. Mais à Honk Kong où son yacht est ancré, son fondé de pouvoir, Biscoton, lui annonce qu'il est ruiné suite à un crack boursier.
Mr. Goh
(Valéry Inkijinoff)
A nouveau désespéré, Arthur songe à se pendre lorsque son précepteur, Mr. Goh, l'engage à penser à ce qu'il laissera de son passage sur terre. Le jeune homme contracte alors une exorbitante assurance-vie au profit de sa fiancée, Alice, et de lui-même. En échange, Mr. Goh lui promet une mort douce au moment où il s'y attendra le moins d'ici à la fin du mois, et ce, afin qu'il profite pleinement de ses derniers jours.
Arthur et Léon
(Jean-Paul Belmondo et Jean Rochefort)
Victime d'étranges accidents et se croyant traqué par deux hommes qu'il prend pour des tueurs à la solde de Goh, Arthur prend peur et la fuite en compagnie de son fidèle valet, Léon. C'est alors qu'il rencontre la ravissante Alexandrine Pinardel.
Alexandrine Pinardel
(Ursula Andress)
Cette jeune ethnologue finance ses études en s'effeuillant dans un cabaret et ôte à Arthur l'envie d'en finir. Avec Léon, il part alors à la recherche de Mr. Goh, parti méditer dans un temple au sommet de l'Himalaya, pour annuler leur pacte.
Suzy, Cornélius et Alice Ponchabert
(Maria Pacôme, Jess Hahn et Valérie Lagrange)
Après un voyage mouvementé, ils rentrent à Honk Kong dont Goh n'est en vérité jamais parti et qui avoue à Arthur n'avoir jamais engagé de tueurs et qui est ravi que le jeune homme ait trouvé l'amour et le goût de vivre. Cependant, Suzy Ponchabert entend bien toucher le magot de l'assurance-vie et paie les services d'un célèbre assassin et de ses sbires pour éliminer son presque gendre.
Alexandrine et Arthur
Cornac et Roqentin, les deux hommes suivant Arthur ayant entretemps pu se présenter à lui comme deux gardes du corps de la compagnie d'assurances, suivent le milliardaire, Léon et Alexandrine dans une folle cavale à travers les Mers du Sud, bravant mille dangers pour échapper à une nuée de tueurs et de leur chef.
Arthur, Cornac et Roquentin
(Jean-Paul Belmondo, Paul Preboist et Mario David)
Ils seront sauvés par l'expiration du contrat passé avec l'assureur. Arthur peut épouser Alexandrine tandis que Léon demande la main d'Alice Ponchabert. C'est alors que resurgit Biscoton pour révéler que la nouvelle de sa ruine était erronnée - ce qui replonge Lempereur dans la déprime...
Le succès international de L'Homme de Rio (1964) incitent ses producteurs, Georges Dancigers et Alexandre Mnouchkine, à en répéter la recette - une comédie d'aventures - et convainquent Philippe de Broca à rempiler. Celui-ci était pourtant réservé car il avait peur de se répéter, mais les considérables moyens financiers mis à sa disposition et le challenge l'emportent sur ses hésitations.
Mnouchkine rêvait depuis longtemps d'une adaptation du roman de Jules Verne et en confie donc l'écriture à Daniel Boulanger qui en tire une fantaisie loufoque à grand spectacle pour laquelle il peut tout se permettre, de la folie la plus débridée aux décors exotiques les plus exubérants. Cela aboutira, selon de Broca, à "un Barnum" regrettable : jugement sévère mais lucide.
En effet, du livre original ne subsiste plus grand-chose. Par contre, l'influence de Tintin, à l'origine de L'Homme de Rio, est toujours là, comme celle de James Bond : la présence au casting d'Ursula Andress, visiblement davantage recrutée pour son sculptural physique que pour son talent d'actrice (elle est absolument incapable d'exprimer la moindre ironie dans son interprétation), en témoigne. Durant le tournage se nouera une idylle passionnelle entre elle et Belmondo, qui les poussera chacun à quitter leurs conjoints ensuite (l'acteur racontera une anecdote amusante à ce sujet : au bras de sa nouvelle compagne, il croise son ancien professeur d'art dramatique, qui lui avait prédit une carrière médiocre et peu de conquêtes féminines à cause de sa gueule de boxeur, et il lui lance alors en le saluant : "voyez, maître, je ne me suis pas si mal débrouillé finalement !").
De Broca parodie même la célèbre scène de James Bond contre Dr. No où Ursula Andress sortait de la mer en bikini dans une scène romantique. Mais ce moment, visuellement complètement gratuit, résume en fait à lui seul les limites du projet où l'esthétique prime sur le récit.
On retrouve quand même des motifs récurrents de l'oeuvre du cinéaste mais trop superficiellement traités pour toucher vraiment dans cette succession d'épisodes frénétiques jusqu'à l'absurde - chacun d'entre eux recèle des merveilles de tonicité, d'inventivité, mais bout à bout, ce n'est qu'une collection de morceaux de bravoure, parfois indigestes, souffrant de longueurs, et manquant de fluidité. L'intensité de chaque segment empêche toute nuance, au détriment du développement psychologique des personnages - des pantins gesticulants alors qu'ils sont aux prises avec une situation pourtant accrocheuse : Arthur pactise pour mourir puis, amoureux, fait tout pour s'en sortir. On reconnaît bien là l'obsession de de Broca pour les héros engagés dans une folle fuite en avant. la fin, amère, démontre d'ailleurs que cette attitude est sans issue.
Pour une comédie, le film est somme toute peu drôle : le valet Léon, joué par le génial Jean Rochefort, est irrésistible de stoïcisme et offre un contraste mal exploité avec l'abattage exceptionnel de Jean-Paul Belmondo, dont la prestation sombre vite dans le cabotinage qui lui sera beaucoup reproché par la suite. La vedette impressionne surtout pour ses acrobaties insensées (durant lesquelles il risquera plus d'une fois sa vie - il faut bien se rendre compte que tout ce qu'il fait n'a pas été tourné comme aujourd'hui dans un studio sur fond vert avec des câbles de sécurité) que pour ses mimiques et sa gestuelle appuyées - une autre indication du manque de rigueur de la direction d'acteurs et du déséquilibre du scénario (l'absence du précieux Jean-Paul Rappeneau pour doser les gags et l'aventure se fait sentir).
Dans des seconds rôles, certains s'en sortent mieux que d'autres, selon leur temps de présence à l'écran (Maria Pacôme parfaite en belle-mère avide, le duo Paul Preboist-Mario David en gardes du corps idiots sont très amusants, alors que Jess Hahn, Darry Cowl et la belle Valérie Lagrange - qui eût fait une bien meilleure Alexandrine - sont sous-employés).
Pour obtenir un peu de nuance dans ce maelström, il faut écouter la magnifique partition de Georges Delerue (disponible en CD avec quelques titres de la BOF de L'Homme de Rio sous la direction d'Alexandre Desplat, son héritier spirituel), où alternent des mélodies orientales et des thèmes romantiques (dont celui, sublime, d'Alexandrine et Arthur).
Le triomphe public de ces Tribulations d'un Chinois en Chine confirmera le statut de hitmaker de Philippe de Broca, désormais courtisé par des majors américaines : grâce à cela, il rebondira avec un projet plus personnel mais au destin improbable...
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