dimanche 8 janvier 2017

LA VIE DE CHÂTEAU, de Jean-Paul Rappeneau (1966)


LA VIE DE CHÂTEAU est un film réalisé par Jean-Paul Rappeneau.
Le scénario est écrit par Jean-Paul Rappeneau, Alain Cavalier, Claude Sautet et Daniel Boulanger (auteur des dialogues). La photographie est signée Pierre Lhomme. La musique est composée par Michel Legrand.

Dans les rôles principaux, on trouve : Catherine Deneuve (Marie), Philippe Noiret (Jérôme), Pierre Brasseur (Dimanche), Henri Garcin (Julien), Mary Marquet (Charlotte), Carlos Thompson (Klopstock).
 Marie
(Catherine Deneuve)

1944. En Normandie, durant l'Occupation allemande. Mariée à Jérôme, Marie vit avec sa mère, Charlotte, séparée de son époux, Dimanche, dans un château qui se dégrade de jour en jour mais dont aucun des parents ne veut financer les travaux de restauration.
Marie et Jérôme
(Catherine Deneuve et Philippe Noiret)

La jeune femme s'ennuie à la campagne et aimerait résider à Paris mais Jérôme n'y tient pas pour deux raisons : d'abord parce que la tranquillité de la nature normande convient à son caractère bourgeois et ensuite cela éloigne sa femme des convoitises d'autres hommes et des plaisirs futiles de la ville.
Dimanche et Julien
(Pierre Brasseur et Henri Garcin)

Mais la quiétude de ce petit monde est bientôt perturbée par la présence dans les parages d'un jeune et séduisant photographe qui vole les pommes de Jérôme et courtise Marie. Tous deux ignorent que cet inconnu se prénomme Julien et qu'il est un membre actif de la Résistance en contact avec Dimanche pour préparer le débarquement allié. 
Julien et Marie
(Henri Garcin et Catherine Deneuve)

Tandis qu'il regagne l'Angleterre pour briefer les britanniques et les américains en leur montrant des clichés du château (et, par inadvertance, de Marie) comme point de chute, les allemands réquisitionnent la demeure. L'officier Klopstock tombe immédiatement sous le charme de Marie. 
Julien, Marie et Klopstock
 (Henri Garcin, Catherine Deneuve et Carlos Thompson)

Parachuté à nouveau en France, Julien est récupéré par Jérôme et Marie qui le présentent à Klopstock comme le frère de la jeune femme. Le résistant va s'approvisionner en explosifs (pour faire sauter les quartiers des soldats ennemis dans le château la nuit du débarquement) auprès de Dimanche tout en dénigrant Jérôme auprès de Klopstock.
Jérôme et Marie

Plein d'espoir, le militaire pense qu'il a ses chances avec Marie mais Jérôme décide alors de la cloîtrer dans sa chambre après avoir remarqué que Klopstock et Julien lui tournaient autour. Elle réussit néanmoins à s'échapper une fois la nuit tombée avec Julien après avoir assommé Klopstock qui les a surpris en train de s'embrasser. Revenu à lui, l'officier lance ses hommes à leur poursuite tout en bouclant Jérôme, Charlotte et Dimanche dans la cave.
Marie

Excédé d'être traité de lâche (par son beau-père et sa femme), Jérôme réagit en s'évadant puis en aidant à préparer le parachutage des alliés tandis que Marie et Julien reviennent au château. Klopstock et ses hommes sont faits prisonniers et Marie se réconcilie avec Jérôme devant Julien. Deux mois plus tard, le couple défile à Paris avec les libérateurs sous les clameurs de la foule.

Après avoir aidé Louis Malle à adapter Zazie dans le métro (1960), Jean-Paul Rappeneau découvre avec son ami cinéaste un superbe château en Bretagne où il a l'idée de baser une histoire qu'il souhaiterait mettre en scène. Il ignore alors qu'il devra patienter cinq ans pour concrétiser son projet.

Entretemps, Rappeneau collabore à l'écriture de scénarios pour d'autres réalisateurs (notamment Philippe de Broca pour L'Homme de Rio, 1962) et se taille une réputation de script-doctor (ou de "matelassier" comme ils se surnomment, Claude Sautet et lui) dans le milieu. Mais il n'abandonne pas son affaire et transpose l'intrigue au Printemps 1944, époque qui lui rappelle son enfance, en Normandie. Peu de producteurs, pourtant, sont prêts à investir de l'argent dans une comédie sur fond de seconde guerre mondiale, même si Claude Sautet, Alain Cavalier et Daniel Boulanger l'aident à peaufiner son script dont il souhaite le ton proche des grandes comédies américaines de Howard Hawks et Ernst Lubitsch.

Le casting initial devait unir Françoise Dorléac et Louis Jourdan, mais ce dernier, exilé aux Etats-Unis, est rapidement rapidement remplacé par Philippe Noiret, recommandé par Sautet. Quant à Dorléac, son emploi du temps surchargé ne lui permet pas de s'engager : c'est la co-productrice Nicole Stéphane qui suggère alors le nom de Catherine Deneuve, remarquée aux côtés de sa soeur dans Les Parapluies de Cherbourg (Jacques Demy, 1964). Rappeneau est aussitôt séduit par la beauté, la pétillance et le débit vocal très rapide de la comédienne. Henri Garcin, Mary Marquet et Pierre Brasseur (ces deux derniers dans les rôles des parents terribles) complètent la distribution. Le tournage débute en Juillet 65 dans une ambiance idyllique, que même les éclats de voix de Brasseur ne troubleront pas.

A sa sortie, le film est récompensé par le Prix Louis Delluc et remporte un énorme succès critique et public : Rappeneau entre d'emblée dans la cour des grands grâce à sa mise en scène audacieuse, fluide et rythmée, l'originalité de son sujet et de son traitement, la fraîcheur de ses interprètes. Il va imposer une vision du cinéma très personnelle, ayant intégré les influences de ses maîtres tout en faisant preuve d'un perfectionnisme jamais démentie ensuite (seulement huit films en 50 ans de carrière !). 

Tout ici est vitesse et légèreté, alternance de prises de vue caméra à l'épaule et de scènes plus posées, les comédiens traversent l'image comme des fusées en dialoguant avec une rapidité qui ne sacrifie jamais la clarté de leurs échanges. C'est un vrai tourbillon. La réalisation a bénéficié des répétitions effectuées en amont du tournage durant lesquelles le cinéaste n'hésitait pas à mimer les situations - procédé qu'il perpétue sur le plateau au point que Philippe Noiret est alors souvent incapable de se concentrer ! Mais le résultat est là : Rappeneau imprime un swing terrible à l'histoire et Catherine Deneuve s'y épanouira pleinement (elle le retrouvera neuf ans plus tard pour le tout aussi réussi Le Sauvage). Il est vrai qu'elle est resplendissante, électrisant chaque plan, et le contraste entre son jeu plein de charme et d'énergie et celui bonhomme de Noiret, avec sa voix traînante et son gabarit massif, produit un effet comique immédiat et ravageur. Henri Garcin, suave, et Brasseur, puissant, sont également formidables.

La photo de Pierre Lhomme (ancien caméraman du chef opérateur des premiers films de de Broca, Jean Penzer) et la musique de Michel Legrand ajoutent encore aux qualités déjà nombreuses de la production : il suffit d'admirer le générique d'ouverture (une succession de clichés de Catherine Deneuve sur une mélodie superbe) pour être conquis.

La conjugaison de tous ces talents, maîtrisé par un cinéaste débutant mais à l'assurance étonnante, a certainement permis la réalisation d'autres comédies avec la même toile de fond (comme Le Roi de coeur de de Broca ou La Grande vadrouille de Gérard Oury). Rappeneau revisitera cette époque troublée avec le même brio 37 ans plus tard avec l'excellent Bon Voyage.  

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