A HISTORY OF VIOLENCE est un film réalisé par David Cronenberg.
Le scénario est écrit par Josh Olson, d'après la bande dessinée de John Wagner et Vince Locke. La photographie est signée Peter Suschitzky. La musique est composée par Howard Shore.
Dans les rôles principaux, on trouve : Viggo Mortensen (Tom Stall/Joey Cusack), Maria Bello (Edie Stall), Ashton Holmes (Jack Stall), Heidi Hayes (Sarah Stall), Carl Fogarty (Ed Harris), William Hurt (Richie Cusack).
A Millbrook (Indiana), Tom Stall est le mari d'Edie, juriste, le père de Jack et Sarah, et le patron d'un diner. Un homme sans histoire dans cette bourgade paisible.
Tom Stall
(Viggo Mortensen)
Mais un soir, deux clients se présentent dans son restaurant alors qu'il s'apprête à fermer. Menaçant une serveuse de mort s'ils ne sont pas servis, ils sont abattus par Tom qui fait alors preuve d'un sang froid et d'une adresse étonnantes dans ces circonstances. Le fait divers attire aussitôt l'attention des médias célébrant cet américain ordinaire et héros discret.
Carl Fogarty et Tom Stall
(Ed Harris et Viggo Mortensen)
Malheureusement, les ennuis vont continuer pour Tom : un homme, Carl Fogarty, dont l'oeil gauche est crevé, se présente, avec ses hommes de main, à son restaurant et s'adresse à lui comme une vieille connaissance en l'appelant Joey. Tom a beau nier, Fogarty ricane et il est immédiatement clair qu'il est là pour régler un contentieux.
Sarah, Edie, Tom et Jack Stall
(Heidi Hayes, Maria Bello, Viggo Mortensen et Ashton Holmes)
La situation pourrit l'existence de la famille Stall : Jack, déjà harcelé par un camarade de classe, le provoque en comparant le fils, une mauviette, au père, un tueur ; Edie remarque que Fogarty la suit avec sa fille Sarah dans un supermarché pour l'inviter à interroger Tom à propos de son passé - dont elle ne sait effectivement pas grand-chose.
Tom et Edie Stall
Fogarty rend visite à Tom chez lui avec Jack en otage pour l'obliger à l'accompagner jusqu'à Philadelphie. Mais Tom réussit une nouvelle fois à abattre ces tueurs, Jack tuant même Fogarty dans le feu de l'action. Ce nouvel exploit inquiète le shérif mais Edie l'éloigne. Toutefois, le malaise reste pesant et Tom avoue à sa femme qu'il s'appelle bien Joey Cusack et a été un exécuteur avant de refaire sa vie sous un faux nom.
Richie Cusack
(William Hurt)
Comprenant qu'il doit affronter son frère aîné Richie, à l'origine de la venue de Fogarty, Tom/Joey se rend à Philadelphie pour négocier la paix. Mais l'explication se soldera par un bain de sang. Il rentre chez lui, indemne, mais en sachant qu'il lui faudra regagner la confiance de sa femme et ses enfants.
L'honnêteté m'oblige à commencer par dire que je ne suis pas un fan du cinéma de David Cronenberg : son obsession pour les tourments de l'âme et les corps éprouvés détaillée dans des films aux ambiances complaisamment malsaines m'ont toujours au mieux laissé froid, au pire déplu. De tout ce que j'ai vu de sa production, je ne sauverai que ce A History of Violence et ce, pour une raison simple : bien que se présentant comme un film noir, en en empruntant des éléments cosmétiques, c'est en vérité un western. Et c'est aussi un long métrage puissant par sa simplicité de la part d'un auteur aussi maniériste d'habitude.
La première scène, un long plan-séquence en travelling latéral, résume d'ailleurs tout le traitement auquel a su se plier Cronenberg pour ce film de commande, adapté d'un roman graphique édité par DC Comics. Deux hommes sortent d'un motel quand l'un demande à l'autre d'y retourner pour remplir un jericcan d'eau. On découvre alors que ces deux clients ont massacré les gérants de l'établissement et leur petite fille. Une présentation banale puis la révélation de l'horreur, soit exactement tout ce que la suite du récit va développer à travers le destin de Tom Stall alias Joey Cusack.
Tout est une question d'apparence dans cette histoire : derrière un citoyen modèle se cache un ancien et terrible tueur. Mais le film aborde aussi l'héritage du mal : Tom Stall a voulu fuir un passé criminel qui le rattrape et Jack, son fils, sera à son tour contaminé par cette violence, comme si elle dormait en lui et n'attendait que de se réveiller. Toute la cellule familiale de Tom implosera ensuite, et lorsqu'il revient chez lui, à la fin de son aventure, en ayant réglé ses comptes définitivement, nul ne sait si les Stall retrouveront une existence normale.
En anglais, l'expression " to have a history of violence" est ambiguë car elle signifie avoir un passé violent, donc posséder un casier judiciaire pour des actes violents, mais plus généralement il s'agit ici d'une histoire de violence et une histoire de la violence, de sa nature, de sa propagation, de la manière dont elle ne se détache jamais des individus qui ont été violents. Ainsi le film questionne sur la rédemption, le pardon, l'oubli - et là encore, la scène finale n'offre pas de réponse claire : un regard échangé entre le mari et sa femme dont le sens est trouble.
Ayant dissimulé son identité réelle pour refaire sa vie, gagner l'amour de son épouse, devenir un citoyen respectable, un bon père de famille, Tom Stall aurait voulu tuer Joey Cusack comme il l'a fait avec ses nombreuses victimes dans le passé et ses agresseurs actuels (les clients psychopathes au début, Fogarty et ses sbires ensuite, son propre frère à la fin), mais Cronenberg signifie bien qu'on ne peut effacer celui qu'on a été, selon la formule "on ne refait pas sa vie, on la continue".
En s'appuyant sur une mise en scène directe, avec une photographie naturaliste (superbe lumière de Peter Suschitzky), au gré d'un rythme sinon lent en tout cas calme, et une construction nette en trois actes (ponctuée par trois fusillades et deux scènes de scène - la première où Edie pimente la vie de son couple lors d'une soirée comme en partageraient deux adolescents amoureux et où elle est vêtue comme une pom-pom girl ; la seconde où c'est Tom qui la rattrape alors qu'elle le repousse puis s'abandonne, visiblement excitée d'être prise par un homme dangereux), le film possède une densité envoûtante tout en étant bref, sec (90 minutes).
Cette aridité formelle, cette narration linéaire, ne rendent que plus cataclysmiques les conséquences de ce que traversent Tom et sa famille. C'est aussi parce que Cronenberg a pris soin de bien installer un cadre normal que lorsque l'action se déchaîne, la violence est aussi explosive - l'impact des coups, les blessures inévitables infligées et reçues dans ces affrontements, sont montrées à la fois rapidement mais explicitement, suffisamment pour choquer mais sans être racoleuses.
Le film est aussi habité, littéralement, par des comédiens à la "physicalité" impressionnante : le visage défiguré de Ed Harris, la sensualité de Maria Bello, la fébrilité d'Ashton Holmes, la vexation de William Hurt, et le masque impénétrable de ce diable séduisant et effrayant à la fois incarné par Viggo Mortensen, dont la finesse expressive nous émeut, nous charme, nous glace.
Comme le dit Tom à sa fille Sarah : "ça n'existe pas les monstres, tu sais". Du moins tant qu'on ignore où ils se cachent.
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