mardi 10 janvier 2017

MA FEMME EST UNE SORCIERE, de René Clair (1942)


MA FEMME EST UNE SORCIERE (I Married A Witch) est un film réalisé par René Clair.
Le scénario est écrit par Robert Pirosh, Marc Connelly et Dalton Trumbo, d'après une histoire originale de Thorne Smith et Norman Matson. La photographie est signée Ted Ttezlaff. La musique est composée par Roy Webb.

Dans les rôles principaux, on trouve : Veronica Lake (Jennifer), Fredric March (Wallace Wooley), Susa Hayward (Estelle Masterson), Cecil Kellaway (Daniel), Robert Warwick (J.B. Masterson), Robert Benchley (Dr. Dudley White), Elizabeth Patterson (Margaret).
 Jennifer et Wallace Wooley
(Veronica Lake et Fredric March)

1672. Salem. Le pasteur puritain Jonathan Wooley condamne Daniel et sa fille Jennifer à être brûlés vifs pour sorcellerie, mais la jeune femme a eu le temps de maudire l'homme de foi : tous ses descendants masculins feront des mariages désastreux. Le sort s'accomplit en effet en 1770, 1861 et 1904.
J.B. Masterson, sa fille Estelle et Wallace Wooley
(Robert Warwick, Susan Hayward et Fredric March)

En 1942, la foudre tombe sur l'arbre au pied duquel ont été enterrées les cendres de Daniel et Jennifer dont les esprits sont alors libérés. Evoluant sous la forme de nuages flottants, ils découvrent alors que le dernier des Wooley, Wallace, est candidat au poste de gouverneur et sur le point d'épouser Estelle, une chipie qui est surtout la fille de J.B. Masterson, le financier de sa campagne électorale. 
Daniel, le père de Jennifer
(Cecil Kellaway)

Jennifer convainc son père de lui redonner un corps humain : pour cela, elle doit renaître comme elle a péri, dans les flammes ; aussi provoque-t-il l'incendie du "Pilgrim Hotel". Passant devant l'établissement avec sa future femme et son beau-père, Wallace prête main forte aux pompiers et sauve Jennifer. 
Jennifer

Tandis que Daniel s'est procuré un corps à son tour, Jennifer veut se venger des Wooley à travers Wallace et prépare un philtre d'amour mais, à la défaveur d'un concours de circonstances, c'est elle qui le boit et s'éprend du jeune homme, déjà fort embarrassé par sa présence envahissante. Alors qu'il s'habille pour ses noces avec Estelle, Wallace est surpris par cette dernière en train d'embrasser Jennifer. 
Wallace Wooley et Jennifer

Estelle rompt immédiatement leurs fiançailles et son père jure de discréditer Walllace qui s'enfuit avec Jennifer. Réfugiés dans une auberge, ils se marient et pour se faire pardonner des ennuis qu'elle lui a causé, Jennifer jure à son époux de sauver sa carrière politique et use de ses pouvoirs pour influencer mentalement les électeurs. Sa victoire est écrasante mais les résultats sidèrent Wooley et déplaisent à Daniel qui prive sa fille de sa magie. 
Wallace et Jennifer

Menacée de mort par son père, La jeune femme convainc Wallace de partir avec elle. Hélas ! le taxi dans lequel ils montent est conduit par Daniel qui fonce sur l'arbre où lui et sa fille ont été enterrés et ressuscités. Elle meurt dans les bras de son mari mais, par la ruse, réussit à convaincre son père de la laisser réintégrer son corps pour tourmenter Wooley. Ceci fait, elle emprisonne l'esprit de Daniel dans une bouteille qu'elle bouche. 
Jennifer, Wallace et la gouvernante Margaret
(Veronica Lake, Fredric March et Elizabeth Patterson)

Les années passent et Jennifer donne plusieurs enfants à Wallace. Tout semble aller pour le mieux jusqu'à ce que la gouvernante de ce dernier, la fidèle Margaret, les prévienne que leur plus jeune fille s'amuse à chevaucher un balai...

Très populaire en France dans les années 1930-40, René Clair quitte l'Europe lors de la Débâcle et se réfugie, comme beaucoup d'autres de ses confrères, à Hollywood qui l'accueille à bras ouverts en lui offrant des ponts d'or. Sa réputation de hitmaker l'a précédé.

Il dirige d'abord La Belle Ensorceleuse (1941, avec Marlene Dietrich) puis enchaîne avec I Married a Witch, produit par la Paramount dont l'histoire est écrite par Thorne Smith, déjà auteur d'une autre comédie fantastique (Le Couple Invisible, de Norman Z. McLeod, avec Cary Grant, 1937). Le studio impose Veronica Lake dans le rôle principal et lui associe Fredric March (Oscar du meilleur acteur en 1932 pour Dr. Jekyll et Mr. Hyde de Rouben Mamoulian).

Depuis le triomphe de King Kong en 1933, le cinéma fantastique est en plein boum, comme l'ont confirmé les succès de La Fiancée de Frankenstein (1935) ou L'Homme invisible (1933), mais il va devenir encore plus populaire en étant conjugué à la comédie (voir Le Ciel peut attendre en 1943, puis Honni soit qui mal y pense et L'Aventure de Mme Muir en 1947). Il s'agit de transposer un phénomène passé et terrible (ici, les sorciers) dans le présent afin d'obtenir des situations humoristiques car décalées.

L'absurdité des temps modernes est incarnée par Wallace Wooley, ambitieux politicien sur le point d'épouser la fille de son argentier bien qu'elle soit une vraie chipie, mais cette mascarade est perturbée par l'intervention de Jennifer, revenue à la vie après avoir été justement condamnée à mort 270 ans auparavant par un ancêtre du héros. Philtre d'amour (bu par la mauvaise personne), sortilèges et maléfices (maladroitement adressés) suscitent le rire à coups de quiproquos mais aussi la romance par ricochet.

Si la satire politique et les effets spéciaux (forcément rudimentaires) ont beaucoup vieilli, rendant certaines péripéties inégales, le charme mutin de Veronica Lake et l'ahurissement permanent de Fredric March ont conservé leur efficacité associée au rythme soutenu avec lequel René Clair mène son affaire (le film dure à peine 75 minutes !).

Le succès du film n'empêchera cependant pas le réalisateur de rentrer en France après la Libération, mais il explorera à nouveau le registre fantastique dans son chef d'oeuvre, La Beauté du Diable (1950), ou dans Les Belles de nuit (1952).

Ma Femme est une sorcière inspirera bien d'autres productions, à commencer par L'Adorable voisine (Richard Quine, 1958) ou les séries télé Ma Sorcière bien aimée (1964-1972) et Sabrina l'apprentie sorcière (1996-2003). Quelle étonnante descendance pour ce film que la Paramount laissa au studio United Artists le soin de le distribuer et dont l'intrigue explore justement les affres connus par les héritiers du pasteur Wooley...

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