mercredi 26 avril 2017

LA PRUNELLE DE MES YEUX, d'Axelle Ropert (2016)


LA PRUNELLE DE MES YEUX est un film écrit et réalisé par Axelle Ropert.
La photographie est signée Sébastien Buchmann. La musique est composée par Benjamin Esdraffo.


Dans les rôles principaux, on trouve : Mélanie Bernier (Elise), Bastien Bouillon (Théo), Chloé Astor (Marina), Antonin Fresson (Léandro), Swann Arnaud (Nicolaï), Laurent Mothe (M. Dimitrios), Thierry Gibault (le conseiller Pôle Emploi). 
 Théo
(Bastien Bouillon)

Théo et Léandro sont deux frères, d'origine grecque, chômeurs en fin de droits, qui jouent de la musique traditionnelle dans des mariages grâce à l'entremise de M. Dimitrios. Pour gagner leur vie, ils acceptent des jobs de serveurs dans des restaurants bien que leur conseiller Pôle Emploi rêverait qu'ils enregistrent une reprise de "Ne me quitte pas" de Jacques Brel avec arrangements traditionnels grecs.
Elise
(Mélanie Bernier)

Par ailleurs, Théo se dispute fréquemment avec Elise, sa voisine, une accordeuse de piano aveugle qui ne cesse de déprécier son talent de musicien (car elle l'écoute répéter chez lui). Pour se venger, il se fait alors passer lui-même comme non-voyant afin qu'elle s'excuse. Mais aucun des deux ne fait d'effort en ce sens. 
Elise, Théo, Léandro et Marina
(Mélanie Bernier, Bastien Bouillon, Antonin Fresson et Chloé Astor)

Toutefois, encouragée par Marina, sa soeur aînée, qui souffre de toxicomanie (et fréquente une addictologue revêche), et qui n'est pas insensible au charme de Léandro, Elise consent à enterrer la hache de guerre avec Theo. Mais cette résolution n'est pas pour plaire à Nicolaï, le patron (lui aussi frappé de cécité) de la jeune femme, dont il est depuis toujours secrètement épris, et à Gianini, un musicien de rock bohème qui dénigre la musique de Théo. 
Elise et Théo

Malgré tout, Théo ne peut se cacher les sentiments qu'il éprouve pour Elise et l'invite à un mariage où il se produit avec Léandro. Bien qu'elle ne cesse de l'interrompre pendant sa prestation pour qu'il améliore son jeu, il lui déclare quand même sa flamme et l'embrasse. 
Théo et Elise

Comme le lui fait remarquer Léandro, Théo doit maintenant avouer à Elise qu'il lui a menti sur sa cécité. Mais la jeune femme découvre son imposture par l'intermédiaire de Nicolaï qui, en accordant le piano de M. Dimitrios, a appris la vérité au sujet du musicien. Pour l'obliger à se démasquer, la jeune femme feint de se jeter sous les roues d'une voiture en traversant une rue : en la sauvant, il se trahit et elle rompt aussitôt.
Théo et Léandro

Marina, qui fréquente désormais Léandro, invite, tout comme Nicolaï, Elise à pardonner Théo de lui avoir certes menti mais par amour. Elle se rend donc dans le restaurant où il a repris son job de serveur après avoir abandonné la musique et elle le défie de tout plaquer pour qu'ils refassent leur ve ensemble.   
"On ne voit bien qu'avec le coeur." (Antoine de St-Exupéry)

Théo et Elise se marient, avec Léandro et Marina comme témoins, en se promettant désormais de ne plus rien se cacher ni d'agir par orgueil.

Pour son troisième film (après La Famille Wolberg, en 2009, et Tirez la langue, Mademoiselle, en 2012), Axelle Ropert, ancienne journaliste aux "Inrocks", s'essaie au périlleux exercice de la comédie sentimentale. Mais elle s'y aventure avec un humour lunaire et décalé qui donne à son projet un charme fou, un esprit joueur et une grande musicalité (J.S. Bach y dialogue avec le Rebetiko).

Le point de départ s'inspire de la "screwball comedy" classique avec deux tourtereaux qui ne se supportent pas, puis la situation prend un tour malicieux à la faveur d'une manoeuvre un brin perverse du héros qui se prétend non-voyant alors que l'héroïne est, elle, vraiment aveugle pour se venger de la manière dont elle le bat froid à chaque fois qu'ils se croisent dans l'ascenseur de l'immeuble où ils habitent.

La mise en scène dans cette narration s'appuie sur ce quiproquo richement et habilement développé, ne cherchant pas tant à provoquer le rire qu'à susciter la complicité avec le spectateur, à la fois amusé de la vengeance de Théo mais aussi attendant le moment (inévitable) où sa supercherie sera découverte pas sa victime et la revanche de cette dernière. Les vrais gags se situent en fait à la périphérie de l'intrigue grâce aux seconds rôles (le conseiller Pôle Emploi qui apprécie les deux frères et rêve de leur faire enregistrer une reprise à la grecque de Jacques Brel, l'addictologue de Marina plus névrosée qu'elle, les graffitis qui changent à chaque scène dans l'ascenseur et illustrent l'évolution de la relation de Théo et Elise).

Par ailleurs, Axelle Ropert emballe son affaire sur un rythme vif (90 minutes à peine) et des dialogues piquants. On est d'ailleurs surpris par ces échanges presque agressifs entre les deux protagonistes, la tension entre eux, mais c'est grâce à cela que la magie opère : cette ambiance électrique donne le sentiment que tout peut arriver, le meilleur comme le pire, que la romance n'est pas gagnée.

Bastien Bouillon interprète cet amoureux en colère, rancunier, en ébullition permanente, qui rend son imposture à la fois touchante et ingrate. Mélanie Bernier, toujours brillante mais trop souvent cantonnée dans des seconds rôles, a enfin un personnage original à défendre et elle le fait de manière formidablement tonique, avec sa séduction naturelle et une fantaisie pleine de répondant.

C'est grâce à cette combinaison de classicisme et de modernité, d'absurde et de romantisme, que La Prunelle de mes yeux est un pur régal : on en sort euphorique, pas seulement parce que c'est divertissant, mais parce que c'est aussi original.

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