mardi 15 novembre 2016

THE SUGARLAND EXPRESS, de Steven Spielberg (1974)


THE SUGARLAND EXPRESS est un film réalisé par Steven Spielberg.
Le scénario est écrit par Hal Barwood et Matthew Robbins, d'après une histoire de Steven Spielberg, Hal Barwood et Matthew Robbins. La photographie est signée Vilmos Zsigmond. La musique est composée par John Williams

Dans les rôles principaux, on trouve : Goldie Hawn (Lou Jean Poplin), Ben Johnson (capitaine Harlin Tanner), Michael Sacks (Maxwell Slide), William Atherton (Clovis Poplin).

Mai 1969. Lou Jean Poplin va voir son mari, Clovis Poplin, détenu dans un centre pénitentiaire de pré-libération du Texas, pour lui expliquer que leur fils de deux ans, Langston, a été placé dans une famille d'accueil. Bien qu'il ne lui reste que quatre mois à tirer, il accepte de s'évader avec sa complicité pour récupérer l'enfant. Ils quittent la prison avec les parents d'un autre détenu.
Clovis et Lou Jean Poplin
(William Atherton et Goldie Hawn)

Peu après, un agent de police en patrouille, Maxwell Slide, arrête la voiture pour dresser une banale contravention et Lou Jean en profite pour prendre le volant et repartir. Le policier les poursuit jusqu'à provoquer leur sortie de route. Lou Jean et Clovis en sortent indemnes mais désarment Maxwell qu'ils prennent en otage à bord de sa voiture de patrouille. 
Clovis, Lou Jean et Maxwell Slide
(William Atherton, Goldie Hawn et Michael Sacks)

Très vite, les autorités sont avisés de la situation et le capitaine Tanner prend les choses en main. Une spectaculaire caravane de flics se met à suivre le véhicule conduit par Slide sous la menace des deux fugitifs. Tanner prend connaissance de leur exigence : Lou Jean et Clovis relâcheront Maxwell contre la restitution de leur fils.
le capitaine Tanner
(Ben Johnson)

Ils traversent ainsi plusieurs villes et bourgades - Beaumont, Dayton, Houston, Cleveland, Conroe et enfin Wheelock, Texas. La population, mise au courant par les médias, de la situation des Poplin prend fait et cause pour le couple, même si, en route, quelques citoyens tentent de les stopper et que Tanner essaie de raisonner Lou Jean en demandant à son père d'intervenir à la radio. Mais même Maxwell sympathise avec Clovis et sa femme. 
Maxwell, Lou Jean et Clovis

La ballade se terminera dramatiquement pour un des trois passagers, mais Lou Jean récupérera, après un court séjour en prison, son fils. 

The Sugarland Express est le premier long métrage réalisé pour le cinéma par Steven Spielberg, puisque, il faut le rappeler, Duel  (1971) avait été tourné pour la télé puis exploité ensuite en salles, grâce à son succès dans plusieurs festivals. 

L'autre fait méconnu est que ce film fut un échec public, malgré une presse élogieuse : ainsi donc, le metteur en scène qui a connu le plus de succès commerciaux du XXème siècle a-t-il démarré sa carrière par un bide ! Mais il allait se rattraper rapidement puisqu'en 1975, Les Dents de la mer devient un retentissant blockbuster qui allait révolutionner le New Hollywood.

Ceci étant dit, il est tout intéressant de remarquer que c'est aussi un des rares opus où Spielberg est crédité comme scénariste puisqu'il a travaillé à la rédaction de cette histoire, basée sur un authentique fait divers impliquant Ila Fae et Robert Dent et le policier J. Kenneth Crone. Dans la réalité, l'affaire ne dura que quelques heures, alors que le film se déroule sur deux jours.

Pour ceux qui estiment donc que Spielberg n'est qu'un gentil cinéaste surdoué pour le divertissement léger (avec la série des Indiana Jones notamment), dont la filmographie est ponctuée par des incursions dans le drame historique (culminant avec La Liste de Schindler), trouveront matière en (re)découvrant The Sugarland Express qu'il a aussi exploré une manière de cinéma alternatif. 

Néanmoins, il est étonnant de constater à quel point ce film concentre ce qu'on connaissait déjà du réalisateur avant (il s'agit d'un road movie comme Duel) mais aussi après (les héros sont adultes au comportement immature et le rôle de l'enfant est central dans leur aventure). Ces protagonistes, Spielberg les dépeint comme des naïfs attachants et nous comprenons facilement pourquoi la population éprouve de la sympathie à leur égard. La police, à travers ses différentes incarnations (du simple patrouilleur au capitaine en passant par les rangers) représentent des adultes à la fois autoritaires, plus pragmatiques et cruels, et logiquement le cinéaste n'hésite pas à les tourner en ridicule ou à souligner leur caractère antipathique.

Plus surprenant reste la dimension à la fois spectaculaire et absurde du déroulement de l'histoire quand on assiste, amusés, sidérés, à l'impressionnant cortège de voitures de police aux trousses des Poplin et de leur otage dans ce qui est tout sauf une course-poursuite puisque Lou Jean et Clovis ne cherchent pas à les semer. Au contraire, leur périple prend son temps, ils vont au contact des gens qui les soutiennent, squattent un camping-car pour une nuit, repartent. C'est un registre que n'a plus guère exploité Spielberg ensuite (échaudé sans doute par les échecs rencontrés quand il s'essayait à la comédie - voir le délirant 1941).

Il dénonce aussi au passage une partie de l'Amérique sur-armée, peuplée de ploucs désireux de remplacer les flics, et des médias plus avides de sensationnalisme que d'informer. Cette dimension politique est aussi l'autre curiosité de ce long métrage, même si Spielberg a ensuite préféré prendre parti en rendant hommage à de grandes figures historiques (comme dans son récent biopic sur Lincoln).

Baigné dans une mélancolie rendue d'autant plus prégnante qu'on devine que l'issue du voyage ne sera pas sans victime, le film profite de l'interprétation de comédiens alors au début de leur carrière (qui ne connut pas de suite glorieuse) : face au vétéran Ben Johnson, un des rares acteurs matures sensibles, Goldie Hawn campe avec énergie cette mère prête à tout. Elle est entourée par un excellent William Atherton, qui semble accepter de la suivre en étant conscient que le dénouement ne sera pas celui qu'elle attend, et par Michael Sacks, parfait en flic embarqué dans cette folle virée et solidaire.

Accompagné par une magnifique musique de John Williams avec l'harmonica magique du regretté Toots Thielemans (disparu il y a quelques mois), The Sugarland Express est une vraie perle rare, subtile et émouvante. 

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