vendredi 23 septembre 2016

LES CHEVRES DU PENTAGONE, de Grant Heslov (2009)


LES CHEVRES DU PENTAGONE (The Men who stare at goats) est un film réalisé par Grant Heslov.
Le scénario est écrit par Peter Straughan, d'après le récit de Jon Ronson. La photographie est signée Robert Elswit. La musique est composée par Rolfe Kent.

Dans les rôles principaux, on trouve : Ewan McGregor (Bob Wilton), George Clooney (Lyn Cassady), Jeff Bridges (Bill Django), Kevin Spacey (Larry Hooper), Robert Patrick (Todd Nixon), Stephen Lang (général Dean Hopgood), Waleed Zuaiter (Mahmud Daash). 
Bob Wilton et Lyn Cassady
(Ewan McGregor et George Clooney)

2003. Au Koweit et en Irak. Le journaliste Bob Wilton végète dans un quotidien publié à Ann Harbor, Michigan, jusqu'à ce qu'il rencontre un certain Gus qui lui raconte avoir appartenu à une unité spéciale et secrète de l'armée américaine rassemblant des soldats dotés de pouvoirs psychiques. Aujourd'hui, ces hommes assisteraient les forces envoyées par George W. Bush en Irak.
 Lyn Cassady et Bob Wilton

Plaqué par sa copine, Bob part au Koweit et fait par hasard connaissance avec Lyn Cassady, une relation de Gus qu'il obtient d'accompagner en Irak. C'est le début d'un road trip délirant au cours duquel l'agent spécial revient sur sa formation.
 Lyn Cassady et Bill Django
(George Clooney et Jeff Bridges)

Tout a vraiment commencé en 1972 quand Bill Django, après une opération au Vietnam, a eu l'idée d'organiser "l'Armée Planète Neuve", une force d'intervention pacifique et préventive. Contre toute attente, il convainc le pentagone de soutenir son projet et il commence à sélectionner des volontaires pour en faire de nouveaux chevaliers Jedi durant les années 80, sous l'administration Reagan.
 Lyn Cassady, Mahmud Daash et Bob Wilton
(George Clooney, Waleed Zuaiter et Ewan McGregor)

Bob et Lyn sont capturés par des irakiens et incarcérés. Cassady reprend le cours de son récit : il a intégré le programme dirigé par Django et il y est devenu un soldat modèle, doué d'étonnantes capacités télépathiques. Mais l'ambiance dégénère avec le recrutement de l'arrogant Larry Hooper, qui devient son rival. 
 Larry Hooper (1er à gauche) et Lyn Cassady (3ème à gauche)
(Kevin Spacey et George Clooney)

L'échange de Lyn et Bob contre un journaliste, Mahmud Daash, se passe mal mais Cassady réussit à désarmer et faire fuir leurs ravisseurs. Ils sont pris en stop par un négociant américain, Todd Nixon, qui les conduit jusqu'à Ramadi où le service de sécurité de l'affairiste déclenche une fusillade. Lyn et Bob se réfugient chez Mahmud qui leur confie une voiture avec laquelle ils reprennent leur voyage. 
 Bill Django et Lyn Cassady

Le suicide d'un volontaire, fils d'un haut gradé, sonna le glas du programme de Django et la démission de Lyn, tandis que Larry propose une nouvelle direction à l'Etat-Major.
 Lyn Cassady (au centre)

Bob et Lyn se perdent dans le désert et sont sauvés par un hélicoptère américain. Ils reprennent connaissance dans une base secrète où les accueillent Larry et Bill, devenu son bras droit dans le projet P.S.Y.O.P.S. auquel il leur offre de collaborer. Mais pour Cassady, ce qu'il s'y passe pervertit tout ce qu'il a appris avec son mentor. Bob et Bill droguent alors la nourriture et l'eau avec du LSD et tous les soldats se mettent à délirer.
Bob, Lyn et Bill

Profitant de la confusion, Bob, Bill et Lyn libèrent les prisonniers du camp ainsi qu'un troupeau de chèvres qui servaient aux expériences de Larry (voulant former ses troupes à les tuer par la seule force de la pensée). Lyn s'envole en hélicoptère avec Bill et confie à Bob la mission de publier leur histoire.
Bien sûr, les révélations de Wilton seront tournées en dérision dans les médias américains - la preuve de l'omerta imposée par l'administration Bush pour le journaliste converti mais toujours résolu à rendre hommage à Cassady et Django, supposément disparus dans le crash de leur hélico...

Produit par George Clooney et Steven Soderbergh, cette comédie loufoque est pourtant inspirée d'une histoire vraie ! Sachant cela, on en découvre les péripéties en riant beaucoup certes mais en étant aussi sidérés par ce qu'on apprend.

Bien qu'il s'agisse du premier film de Grant Heslov, ce nom est familier des fans de Clooney puisqu'il a écrit pour  - et avec - lui les scripts de Les Marches du pouvoir et Monuments Men. Ce n'est pas le seul élément grâce auquel le long métrage établit une complicité avec le spectateur car le ton absurde et la construction sous la forme d'un road movie renvoient aux oeuvres des frères Coen, qui ont plusieurs fois dirigé Clooney et Jeff Bridges (l'inoubliable Big Lebowski).

Le casting est extraordinaire et constitue indéniablement le principal attrait de cette production où Ewan McGregor (épatant en candide devenant converti) et Kevin Spacey (jouant sur du velours avec un personnage odieux) donnent donc la réplique à Clooney (toujours grandiose dans ce registre d'idiot illuminé) et Bridges (hilarant en instructeur-gourou baba-cool). C’est quand même rien moins la réunion du du Dude, d'Everett McGill, de Kaizer Soze et d’Obi-wan Kenobi - et la référence répétée à la saga Star Wars et les chevaliers Jedi a dû être particulièrement savoureuse pour McGregor (qui n'avait pas caché s'être ennuyé en tournant avec George Lucas). 

Le résultat est efficace, souvent très amusant, complètement loufoque, mais il faut bien admettre que Grant Heslov et le scénario de Peter Straughan ne sont pas tout à fait à la hauteur des promesses du récit de Jon Ronson. Partant sur des bases élevées, se déployant en une épopée à l'absurdité réjouissante, on se doute que le dénouement sera décevant : comment pourrait-il en être autrement ? Le rythme faiblit sensiblement dans la dernière partie (quand tout ce beau monde se retrouve dans la base PSYOPS dirigée par Larry Hooper) et l'épilogue est trop plat. Dommage.

C'est donc dans le voyage surréaliste de Lyn et Bob que The Men whot stare at goats comble le plus et les fans de Clooney, et les amateurs de farce cynique. Les rebondissements les plus farfelus s'enchaînent, les flash-backs sont fabuleux (toute les origines de "l'armée planète neuve"), et l'épisode à Ramadi est un aparté détonant mais du même calibre (Robert Patrick y fait une apparition exemplaire de l'absence de scrupules des américains sur le sol irakien à l'époque et les réflexions méprisantes sur le refus français de s'impliquer sont grinçantes - mais l'Histoire nous a donnés raison, tandis que les anglais gouvernés par Tony Blair ont foncé tête baissé dans cette pathétique affaire d'armes de destruction massive cachées par Saddam Hussein). Cela renvoie aussi aux marchés potentiels que représentent les pays longtemps ravagés par des guerres lorsqu'il faut ensuite reconstruire sur les ruines.  

Les Chèvres du Pentagone n'est donc pas exempt de défauts, mais sa singularité, son audace lui confèrent un charme accrocheur. Vite vue (1h 30), cette comédie sur la guerre et ses fous prend même aujourd'hui, à la lumière de la tragédie syrienne, un relief surprenant, qui invite à méditer sur l'interventionnisme (ou l'absence d'action) jamais désintéressé des grandes puissances.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire