mardi 6 septembre 2016

FANTASTIC MR. FOX, de Wes Anderson (2010)


FANTASTIC MR. FOX est un film d'animation réalisé par Wes Anderson.
Le scénario est écrit par Wes Anderson et Noah Baumbach, d'après le livre de Roald Dahl. La photographie est signée Tristan Oliver. La musique est composée par Alexandre Desplat.

Les voix en version originale sont assurées par : George Clooney (Foxy Fox), Meryl Streep (Felicity Fox), Jason Schwartzman (Ash Fox), Eric Anderson (Kristofferson), Bill Murray (Badger), Willy Wolodarsky (Kylie), Willem Dafoe (le Rat), Robin Urlstone (Boggis), Hugo Guinness (Bunce), Michael Gambon (Bean).

Après avoir été complices en vols de tous genres, Foxy et Felicity Fox ont décidé de changer d'existence pour élever honnêtement leur fils unique, Ash. Foxy abandonne ainsi ses activités coupables pour devenir un éditorialiste respectable et ambitionne d'offrir un foyer digne confortable à sa famille.
Un bel arbre pour la famille de Foxy Fox...

Pour réaliser son rêve, Foxy convainc le notaire, Badger, de l'aider à acquérir un bel arbre même si celui-ci est planté en face des propriétés de Boggis, Bunce et Bean, trois propriétaires humains aussi riches que redoutables pour les animaux nuisibles à leurs exploitations.
Foxy et Felicity Fox

Cependant, après une douzaine d'années tranquilles, Foxy s'ennuie et il reprend ses méfaits en mentant sur ses escapades nocturnes à Felicity, devenue peintre-paysagiste, et à Ash, qui aimerait pourtant l'accompagner pour gagner son respect.
Ash et Kristofferson

Ce train-train est bouleversé avec l'arrivée de Kristofferson, le neveu de Foxy, dont le père est malade. La présence du nouveau venu attise la jalousie de Ash car ce cousin est un modèle de vertu, instruit et pratiquant le yoga. Cela séduit Foxy, qui peut compter sur cet allié calme et habile, et à Felicity, qui le juge digne de confiance.
Boggis, Bunce et Bean

Mais, en allant voler la volaille de Boggis, Bunce et Bean, Foxy déclenche leur colère. Elle atteint rapidement des proportions épiques et les représailles des trois humains mettent en péril non seulement la famille du renard mais aussi celles de tous les animaux du voisinage.
Le Rat

Coincés sous terre, manquant de vivres, la communauté reproche son inconséquence à Foxy avant de de se rassembler derrière lui lorsque Kristofferson est capturé et que le fameux renard perd sa queue dans la bataille. 

Que Wes Anderson adapte un jour un ouvrage de Roald Dahl, voilà qui était comme une évidence : on trouve chez le cinéaste et le romancier la même malice et la même adresse pour parler de thèmes graves avec énergie. Par ailleurs, la fameuse esthétique "maison de poupées-boîte à bijoux" de l'un convient tellement bien au petit monde si mobile raconté par l'autre que leur rencontre promettait des merveilles. Promesses parfaitement tenues avec cette superbe transposition du récit Fantastique Maître Renard.

Ce film a aussi été une étape importe pour Anderson qui avait un peu déçu ses fans avec son précédent opus, A Bord du Darjeeling Limited (2007) - même si, pour ma part, j'ai une grande tendresse pour ce long métrage. Cela lui fournissait l'occasion de s'essayer à une technique inédite pour lui, celle du cinéma d'animation au moyen du procédé de la stop motion capture, c'est-à-dire des prises de vue image par image de figurines dans des décors en modèle réduit (popularisé par les studios Aardman, à qui on doit Wallace et Gromit ou Chicken Run avec leurs héros en pâte à modeler).

Après leur collaboration sur La Vie Aquatique (2003), Anderson veut partager la réalisation avec Henry Selick (L'Etrange Noël de Mr. Jack, 1993), familier de l'univers de Roald Dahl (dont il a adapté James et la Pêche Géante en 1996), mais ce dernier préfère se consacrer à Coraline (2009), d'après Neil Gaiman. Le cinéaste lui trouve alors comme remplaçant Tristan Oliver

Anderson veut totalement s'imprégner de l'esprit de Dahl et loue sa propriété de Gypsy House dans le Buckinghamshire : dans ce cadre bucolique, il trouve l'inspiration pour celui de l'histoire, avec l'arbre où habitera la famille Fox, puis listera tous les objets, accessoires et autres éléments prolongeant l'intrigue. Il en respecte d'ailleurs fidèlement la construction narrative, n'y ajoutant qu'une (épique) poursuite finale, et modifiant légèrement le dénouement, mais l'histoire correspond surtout aux thèmes explorés dans ses précédents films, peaufiné avec Noah Baumbach (déjà co-auteur de Life Aquatic with Steve Zissou).

Comme les héros habituels de Anderson, Foxy Fox est un adulte qui n'a pas grandi et n'assume pas ses responsabilités : son comportement va provoquer une série de catastrophes dont ses proches vont souffrir. C'est une figure semblable à celle de Royal Tenenbaum, Steve Zissou. Mais à côté de ce père indigne, il y a un fils qui, parce qu'il cherche le respect de son géniteur et se questionne sur le sens de (sa) la vie, fait contrepoids : en s'invitant dans la grande aventure alors déclenchée, il permet une résolution des problèmes, résout les conflits, en privilégiant l'action au dialogue. Mr. Fox avait promis à sa femme, Felicity, à la naissance de leur fils, Ash, de cesser ses rapines pour leur assurer une vie de famille paisible. En manquant à sa promesse, et en semant le chaos à cause cela, il n'a pas d'autre choix pour se racheter, aux yeux des siens mais aussi de la communauté qu'il a compromise, que de réparer.

Le miracle du film, au-delà de la performance technique, soulignée par un montage très tonique (préfigurant la furia de The Grand Budapest Hotel avec ses séquences dignes du slapstick), tient surtout à l'équilibre prodigieux entre l'abondance des péripéties, tour à tour spectaculaires et drôles, et l'émotion qui s'y glisse, interrogeant la notion de famille, de filiation, de solidarité, de résistance. 

Anderson a pu s'appuyer sur un casting vocal exceptionnel, lui-même mis en condition dans des circonstances peu communes : en effet, tous les acteurs ont non pas enregistré en studio mais en plein air, dans une nature semblable à celles de leurs personnages, et surtout en mouvement, pour obtenir un rendu plus réaliste dans la diction, les respirations, les intonations, le rythme. Avoir réussi à embarquer dans une telle aventure George Clooney (Foxy), Meryl Streep (Felicity) - deux nouveaux venus - mais aussi des habitués comme Jason Schwartzman (Ash), Bill Murray (Badger), Willy Wolodarsky (Kylie), Michael Gambon (Bean), Eric Anderson (Kristofferson - le propre frère de Wes) et Willem Dafoe (le Rat), sans oublier Adrien Brody, Owen Wilson dans de plus petits rôles participent au régal.   

On en oublierait presque qu'on assiste à une sorte de super représentation de marionnettes, patiemment animées, tant l'ensemble possède une fluidité époustouflante. La photo est superbe, avec ses teintes automnales, et la bande originale d'Alexandre Desplat (qui combine avec des titres des Beach Boys, Rolling Stones ou des extraits de la partition de George Delerue pour Les Deux anglaises et le continent) est magnifique (le compositeur va devenir le nouveau partenaire attitré d'Anderson, remplaçant le fidèle Mark Mothersbaugh).

Fantastic Mr. Fox est un chef d'oeuvre : stylisé, amusant et mélancolique, incroyablement entraînant, abondant en morceaux de bravoure (comme le combat digne des meilleurs duels kung-fu entre Foxy et le Rat), il a permis de constater que Wes Anderson n'avait rien perdu de son immense talent - mieux même, il lui aura donné un deuxième souffle.

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