mardi 28 mars 2017

PERFECT SENSE, de David MacKenzie (2011)


PERFECT SENSE est un film réalisé par David MacKenzie.
Le scénario est écrit par Kim Fupz Aakeson. La photographie est signée Giles Nuttgens. La musique est composée par Max Richter.


Dans les rôles principaux, on trouve : Eva Green (Susan), Ewan McGregor (Michael), Connie Nielsen (Jenny, la soeur de Susan), Stephen Dillane (Samuel, le collègue de Susan), Ewen Bremner (James, le collègue de Michael).
Susan
(Eva Green)

Une épidémie d'origine inconnue se répand dans le monde entier, privant d'abord l'humanité de son odorat. Susan est une épidémiologiste qui fait partie d'une équipe anglaise chargée de découvrir les raisons de ce problème et de trouver des réponses et des solutions.
Michael
(Ewan McGregor)

Michael est un chef cuisinier dans un restaurant londonien, situé à côté de l'immeuble où habite Susan. Il se rend vite compte de l'impact de cette épidémie quand les clients commencent à déserter son établissement et que lui-même est affecté par cette privation sensorielle.
Susan et Michael

Susan et Michael ne tardent pas à faire connaissance. Ils couchent ensemble avec la volonté commune de ne pas s'engager dans une relation sérieuse. Mais ils se revoient fréquemment par la suite et deviennent amants et amoureux. 
Des souvenirs avant de tout perdre

L'épidémie progresse : après l'odorat, la population perd le goût. Une panique irrationnelle puis l'angoisse d'une nouvelle étape gagne la civilisation. Puis les gens se résignent et tentent de s'adapter à leur nouvel état. De plus en plus intimes, Michael et Susan partagent les secrets de leur passé : elle a souffert d'anorexie dans son adolescence et à cause de cela, elle est devenue infertile ; lui a eu une histoire d'amour avec une jeune femme tombée gravement malade qu'il a lâchement quitté car il ne se sentait pas assez fort pour la soutenir - elle est désormais morte et, bien qu'il regrette son attitude, il culpabilise moins. 
"Mr. and Mrs. Assholes"

La crise s'aggrave quand survient la perte d'audition : une recrudescence de colère extrême et de rage éclate. Michael exprime verbalement cette violence contre Susan qui prend peur et s'enfuit. En dépit de tout, le calme revient, les gens essaient de reprendre leurs habitudes, notamment en apprenant le langage des signes pour continuer à communiquer. Lentement, c'est même une euphorie inattendue qui s'impose, chacun ayant désormais la certitude qu'une nouvelle épreuve va se produire. 
Dernier baiser avant la fin du monde

Effectivement, la cécité frappe le monde. Avant de perdre la vue, Michael se précipite chez Susan qui, elle, part le chercher à son restaurant. Ils se retrouvent in extremis dans la rue derrière l'établissement, en bas de l'immeuble où elle réside. Ils s'enlacent et s'embrassent juste avant de devenir aveugles. Il ne leur reste plus qu'un seul sens désormais : le toucher.

Parfait contrepied de Contagion (Steven Soderbergh, 2011), avec son casting de stars et son spectaculaire suspense, le long métrage de David MacKenzie explore le même thème - une épidémie mondiale - mais en en retirant tous les motifs attendus dans un film-catastrophe - scènes de panique générale, violences de masse, représentation horrifique des effets de la maladie, etc.

Ici, effectivement, la maladie ne tue pas, elle est plus sournoise en privant progressivement l'humanité de ses perceptions sensorielles. Cette progression est d'autant plus angoissante qu'elle reste jusqu'au bout sans explication ni remède et s'illustre par un crescendo intense et tragique où l'homme est autant victime de ses peurs primitives que disposé à savourer de nouveau l'existence.

La métaphore est troublante, aussi déconcertante qu'envoûtante. En inscrivant son sujet dans le cadre d'une romance, le cinéaste en souligne la force mélancolique puisque le mal frappe au moment où ses deux héros trouvent enfin le bonheur après des épreuves traumatisantes dans leurs passés respectifs. D'ailleurs, ce qui les accable n'est pas létale : il n'y a donc pas de suspense conventionnel avec la recherche des causes de l'épidémie, celle d'un remède et le sauvetage de l'humanité.

Le film est découpé en quatre actes, correspondant aux quatre sens que perdent les humains, et chacune de ces pertes est habilement traduite par la mise en scène, de manière à la fois poétique, cruelle et percutante (mention spéciale à la perte de l'audition : pendant dix bonnes minutes, plus aucun son, pas davantage de musique pour illustrer la situation - effet garanti !). La tristesse, la colère, la frustration, la résignation se succèdent après chaque nouvelle crise, produisant des moments étonnants.

Le talent avec lequel MacKenzie réussit à immerger le spectateur dans cette expérience est d'autant plus remarquable qu'on devine que le film n'a pas disposé de gros moyens. Mais en préférant se concentrer sur son couple, il permet de mieux s'identifier, de partager leurs peurs, leurs doutes, leur soif de profiter de l'instant. Eva Green et Ewan McGregor interprètent cette partition avec une implication et une justesse égales, avec sobriété et force, l'alchimie de leur couple fonctionne puissamment, leur histoire d'amour est touchante, ponctuée de hauts de de bas crédibles.

Bien entendu, le piège du procédé narratif (on attend chaque nouvelle crise avec un mélange de curiosité et d'inquiétude) est inévitable, et le dénouement (avec la cécité) est illustré par un écran noir juste avant le générique. Mais il n'empêche que le récit, solide et originale, résolument à contre-courant du traitement réservé à ce genre d'intrigue, procure son lot d'émotions fortes et poignantes.  

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