lundi 6 février 2017

IPCRESS : DANGER IMMEDIAT, de Sidney J. Furie (1965)


IPCRESS : DANGER IMMEDIAT (The Ipcress File) est un film réalisé par Sidney J. Furie.
Le scénario est écrit par Bill Canaway et James Dorman, d'après le roman de Len Deighton. La photographie est signée Otto Heller. La musique est composée par John Barry.


Dans les rôles principaux, on trouve : Michael Caine (Harry Palmer), Nigel Green (le commandant Dalby), Gary Coleman (le colonel Ross), Sue Lloyd (Jean Courtney), Frank Gatliff (Eric Ashley-Gramby alias "Blue Jay"), Gordon Jackson (Jack Garswell). 
 Harry Palmer
(Michael Caine)

Agent secret récemment sorti d'une prison militaire, remarqué aussi bien pour sa tendance à l'insubordination que pour son efficacité sur le terrain, le sergent Harry Palmer est prêté par son supérieur, le colonel Ross, aux services du commandant Dalby. 
Le colonel Ross
(Gary Coleman)

Depuis plusieurs mois en effet, c'est plus d'une centaine de savants britanniques qui ont disparu ou sont passés dans l'autre camp. Le dernier d'entre eux est le physicien Radcliffe, et Palmer doit avec ses nouveaux collègues le retrouver. 
Jean Courtney et Harry Palmer
(Sue Lloyd et Michael Caine)

On soupçonne Eric Ashley-Gramby alias "Blue Jay" d'avoir enlevé le scientifique et Palmer l'aborde en suivant son garde du corps à l'intérieur d'une bibliothèque publique. Il lui fait savoir que les autorités sont disposées à verser une rançon pour récupérer le "matériel". Un montant et un rendez-vous sont fixés pour cette transaction. 
Jack Garswell et Harry Palmer
(Gordon Jackson et Michael Caine)

L'échange se déroule sans problème jusqu'à ce que Palmer abatte accidentellement un agent de la C.I..A. qui surveillait, sans avoir averti les services britanniques, l'opération. On assigne l'espion à la protection rapprochée de Radcliffe qui, lors d'une conférence, manifeste des troubles sérieux du comportement au niveau de la mémoire et de l'élocution. 
Harry Palmer, le commandant Dalby et Eric Ashley-Gramby/"Blue Jay"
(Michael Caine, Nigel Green et Frank Gatliff)

Un collègue de Palmer, Jack Garswell, pense que le savant a subi un lavage de cerveau. Mais la situation devient accablante pour Palmer lorsque son partenaire puis un nouvel agent de la CIA qui le filait sont assassinés et que les preuves du lavage du cerveau de Radcliffe sont escamotées.
Harry Palmer

Tout accuse Palmer qui préfère fuir, avec l'aide de Sue Lloyd, secrétaire de Dalby avec qui il a une liaison, mais dans le train qui l'emporte loin de Londres, il est capturé. Torturé par "Blue Jay", il feint l'amnésie pour mieux s'évader et prévient Ross et Dalby de sa position - il pensait être détenu en Albanie mais n'a jamais quitté la capitale.
Harry Palmer

Les deux officiers le rejoignent dans le hangar où il a été séquestré et Palmer confond le traître qui a voulu le manipuler tandis que son autre supérieur lui avoue que toute sa mission consistait justement à démasquer l'agent double en affaire avec "Blue Jay" pour kidnapper les savants contre de l'argent.

Heureux producteur des premiers James Bond, Harry Saltzman a l'idée en 1965 d'en proposer une version radicalement différente en adaptant la série de romans de Len Deighton dont le sergent Harry Palmer est le héros. Il ambitionne de donner une vision plus réaliste des espions et engage pour réaliser le film un jeune réalisateur canadien, Sidney J. Furie, qui a fait ses preuves à la télévision.

Le résultat sera si audacieux visuellement que Saltzman écartera le cinéaste de la salle de montage. Mais avec ses compositions psychédéliques et sa narration plus amère et ironique, Furie a si bien imprimé sa marque que The Ipcress File conservera sa flamboyance baroque et son ton irrévérencieux.

On retrouve dans l'équipe plusieurs habitués des James Bond : même chef opérateur (Otto Heller s'est déchaîné), même monteur, même directeur artistique, mais c'est comme si tout ce beau monde avait pris de l'acide. En prime, John Barry est aussi de la fête et se fend d'une bande originale superbe, avec un thème principal qui ne vous sort plus de la tête une fois que vous l'avez entendu - la preuve :

Harry Palmer est à l'opposé de l'espion favori de sa Majesté : il porte des lunettes carrées (car il est myope), un imperméable, et a un casier judiciaire. Certes, il est aussi taquin et désinvolte avec ses patrons, séducteur avec les femmes. Néanmoins, contrairement à Bond, ce n'est pas un surhomme. Tout le film renvoie une image peu flatteuse des services secrets avec une hiérarchie gangrenée et tatillonne composée de bureaucrates imposant aux agents de terrain de remplir des formulaires aux noms imprononçables à chacun de leurs déplacements. Toutes les officines se jalousent et frayent avec des malfrats notoires.

En lieu et place de décors exotiques, on a droit à un second acte dans une prison-laboratoire albanaise pour d'éprouvantes séances de torture... Qui s'avérera être située en plein coeur de Londres dans un hangar. Les repères habituels sont brouillés, démythifiant les codes du film d'espionnage, visant à égarer autant le héros que le spectateur.

A ce jeu, Michael Caine est tout simplement formidable, sarcastique et vengeur, charmeur et expéditif, iconoclaste et solitaire. Servi par la mise en scène délirante de Furie (dont chaque cadrage est étudié pour déstabiliser), il met à jour la médiocrité des enjeux et des officiers, les appétits de chacun - à commencer par les siens - étant triviaux. Une jubilatoire déconstruction aussi sardoniquement drôle (dans la première partie) que lugubre (ensuite).

Harry Palmer reviendra dans deux autres films (Mes Funérailles à Berlin en 66 et Un Cerveau d'un milliard de dollars en 67). Mais sans doute parce qu'il était trop atypique, sa franchise s'arrêtera là. Raison de plus pour redécouvrir cette expérience qui n'a pas volé son statut de film-culte.

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